Milan était chaude et silencieuse, dans la torpeur de l’été 1940. Contre l’avis de l’opinion publique, contre celui du Roi Victor-Emmanuel III, et contre l’avis même de Galeazzo Ciano, époux de la fille aînée de Mussolini, et tristement célèbre ministre des Affaires étrangères du régime fasciste, l’Italie venait de déclarer la guerre à la France et au Royaume-Uni.
La petite famille de Giulio avait décidé de quitter Alessandria, cœur de la province éponyme, dans la plaine du Pô, préférant fuir vers un petit village isolé de la montagne piémontaise alors que le régime de Mussolini déployait des milliers de soldats au pied des Alpes afin de contenir une éventuelle offensive militaire française.
Giulio, comptable de son état, avait hérité d’une petite maison de campagne familiale, perchée au delà de plusieurs kilomètres d’une longue côte sinueuse serpentant entre les chênes verts, les pins maritimes, et les nuées d’oliviers. Il savait à quel pénible voyage il fallait s’attendre, sur des routes mal entretenues, dans une automobile bondée de vêtements divers, d’objets personnels aussi incongrus qu’hétéroclites, de denrées et de vivres de première nécessité, et de non moins précieuses bouteilles de Barolo. Mais il savait surtout qu’au bout du compte, lui, son épouse Giovanna, et leur fils de huit ans trouveraient refuge dans une paisible masure, sur les hauteurs de la montagne, à l’abri relatif des grondements de la guerre qui venait.
Quitter Alessandria, où son fil était né, provoquait chez Giulio un véritable déchirement. Son propre père, enfant abandonné, trouvé et baptisé par un fonctionnaire de la ville, y avait toujours vécu. Giulio également y avait grandi, joué, étudié, jusqu’à achever son parcours scolaire aux portes de l’Université du Piémont oriental.
Ils ne pouvaient partir ainsi. Guilio proposa à son épouse de s’arrêter à Milan.
– « Il faut que le petit voit Milano, Dieu seul sait ce qu’il en restera dans quelque temps. Avec ces fascistes au pouvoir, nous ne reverrons peut-être jamais ces trésors. »
Son épouse acquiesça, et il fut convenu qu’ils s’arrêteraient déjeuner sur la Piazza Pio XI, et tâcheraient de visiter la Pinacoteca Ambrosiana, où ils pourraient peut-être contempler la collection de tableaux et de dessins offerts par le cardinal Federico Borromeo. Et même peut-être visiter la célèbre Biblioteca Ambrosiana, fondée en 1609.
Le voyage se déroula sans encombre, mais l’entrée dans Milan ne fut pas des plus aisées. Les soldats étaient partout, bloquaient chaque route, contrôlaient chaque point d’entrée de la ville, vérifiant méticuleusement les passeports, les papiers d’identités, et scrutant d’un regard sombre et légèrement paranoïaque chacun de leurs interlocuteurs.
La famille de Guilio finit par franchir tant bien que mal tous les points de contrôle, signe aussi certain d’une apparence des plus normées que d’une volonté sans failles, et après avoir garé le véhicule dans un endroit pas trop isolé – une grande partie de leur vie se trouvait à l’intérieur – s’en fût déjeuner comme prévu à l’ombre de l’une des terrasses extérieures de la Piazza Pio.
Après le repas, ils marchèrent jusqu’aux hautes colonnes romaines de la majestueuse porte d’entrée de la Pinacoteca Ambrosiana, et après l’attente d’une courte file, se trouvèrent bientôt minuscules sous les imposantes fenêtres de l’immense bâtisse aux murs d’ocre jaune immaculé. Une fois entrés, ils se sentirent plus petits encore, forts impressionnés au milieu des quelques visiteurs, petites fourmis grouillant aux pieds des statues surélevées de Venus callipyges, et d’illustres personnages, de Dante Alighieri au Caravage, du grand Léonardo Da Vinci à l’éternel Raffaello Sanzio.
Après avoir traversé le patio, ils visitèrent tout d’abord la collection du cardinal Federico Borromeo, exposée dans les quatre couloirs qui entouraient la salle de lecture de la bibliothèque. S’il n’était point expert, Guilio savait tout de même distinguer les œuvres de Bergognone, de Bernardino Luini, ou de Bramantino. Ils contemplèrent les fameuses copies de tableaux célèbres promues par le cardinal, dont une étonnante réplique de la Cène de Leonardo, qui semblait en fort mauvais état.
Guilio et la famille s’arrêtèrent ensuite longuement devant le Repos pendant la fuite en Egypte, de Paolo Caliari, dit Veronese. Guilio était songeur. Il ne pouvait s’empêcher de ruminer leur propre exode. Il raconta ainsi l’histoire du tableau à son fils : Lorsque le roi Hérode ordonna le massacre de tous les nouveaux-nés de Bethléem, Marie, Joseph et l’Enfant Jésus s’enfuirent vers l’Égypte voisine. L’histoire raconte que la famille trouva alors repos dans une oasis, lieu du premier miracle de Jésus, qui y fit prodigieusement éclore les dattiers, et comme par enchantement, jaillir l’eau du sol.
Non moins surréaliste, la visite de la Pinacoteca Ambrosiana pouvait être longue. Il y avait de nombreuses chambres, une multitude de salles, et sans compter ses différents halls, l’ensemble du bâtiment proposait plus de vingt espaces d’expositions d’œuvres toutes aussi rares qu’exceptionnelles.
Ils parcoururent les salles consacrées à la peinture italienne des XVième et XVIème siècles, et plusieurs autres chambres, ou trônaient – imperturbables – la Madonna del padiglione de Botticelli, un mystérieux Portrait de femme de Giovanni Ambrogio de Predis, celui d’un musicien peint par Leonardo, et puisque le Christ n’était jamais très loin, l’Adoration des mages, de l’immortel Titien.
Absorbés qu’ils étaient par tant de beauté sublimée, par ce torrent d’histoire, tant de savoir et de majesté, le couple ne prit plus garde à l’enfant, qui s’éloigna bientôt dans une autre salle. Ce n’est qu’après avoir contemplé pour la première fois de leurs vies les photographies cartonnées de L’École d’Athènes de Raffaelo immortalisés au XIXème siècle par Giacomo Brogi, qu’ils s’aperçurent que leur fils avait disparu.
Ils revinrent sur leur pas, explorèrent les salles aux alentours, interrogèrent quelques visiteurs, mais de l’enfant, ils ne trouvèrent nulle trace. Guilio dû se rendre à l’évidence, et s’en fût en courant prévenir les gardiens. Il donna la description du jeune homme, 8 ans, un pull-over bleu, un pantalon marron, les cheveux bruns, cours, et coiffés sur le coté.
Dans une relative discrétion eu égard à la solennité du lieu, l’alerte fût donnée, et bientôt gardiens, guides, et les parents, entreprirent discrètement d’explorer chaque recoin du musée. Ils passèrent devant les palimpsestes des uniques fragments existants de la Vidularia de Plaute, ils coururent presque sans même le voir devant l’autel de l’Aulo Gelio décoré et signé par Guglielmo Giraldi, bref, ils se répandirent partout dans la plus grande panique contenue, mais du petit, ils ne trouvèrent nulle trace.
Bientôt la Pinacoteca allait fermer ses portes, il allait falloir prévenir les autorités. Le conservateur, entouré de son collège d’aréopages, tentait maladroitement de rassurer Guilio et son épouse, visiblement plus gêné par la perspective du scandale de la disparition d’un enfant dans son établissement que par la détresse du couple. Et puis, lui vint une idée.
-« Aller chercher le vieux Bonnacci ! », adressa-t-il à l’un de ses sous-fifres, qui, sentant souffler la tempête de l’impératif, s’élança en courant sur le champ.
Ils étaient tous debout devant Le Feu et l’Eau, de Jans Brueghel, lorsque l’on entendit, au bout de quelques longues minutes, éructer fortement dans la pièce voisine, et frapper au sol comme d’un coup de bâton.
C’est alors qu’entra le vieux Bonnacci. C’était un vieillard noueux, encore robuste, aidé d’une canne qui lui servait manifestement plutôt à porter de petits coups dans les jambes de ses interlocuteurs qu’à marcher. Son costume était des plus vétustes, mais sa chemise complètement élimée était impeccablement boutonnée, assortie d’un vieux veston au ton douteux qui avait dû être élégant avant les ravages des siècles.
Le vieux Bonnacci regarda la petite troupe comme par en dessous, d’un regard sombre, et légèrement amusé. Il semblait sonder l’âme de chacun, et n’en penser pas moins. Le conservateur présenta les parents au vieil homme, puis leur expliqua que Bonnacci vivait ici, dans une chambre du grenier de la Pinacoteca, et que c’était ainsi depuis tellement longtemps que tout le monde avait oublié comment et pourquoi il était là. Mais c’était lui, incontestablement, qui connaissait le mieux ce dédales interminable de chambres, de salles, et de galeries.
“Nous avons fouillé partout, de la cave au grenier, partout, Bonnacci. Il n’est nulle part !”, vitupéra le conservateur.
Le vieux ne daigna pas lui répondre, et se tourna séant vers les parents du petit disparu.
-“Et qu’est ce qu’il aime, il picolo diabolo ?”, gronda Bonnaci, avec une prononciation subtilement réductrice du dédoublement phono-syntactique caractéristique de l’italien, comme seul l’atavisme permet au milanais de la produire sans même y songer.
-« Lire », répondit Guilio. « Depuis qu’il est en âge de lire, il est toujours fourré le nez dans les bouquins. »
Déjà, le vieux s’était élancé, canne en avant battant le sol, patte un peu folle en cadence, en direction de la Biblioteca Ambrosiana.
Le conservateur grommela qu’ils avaient déjà fouillé toute la bibliothèque, mais Bonnacci semblait n’en avoir cure, et poursuivait son chemin. La petite troupe lui emboîta le pas, et bientôt ils furent entre les immenses et inestimables rayonnages de l’une des plus vieilles bibliothèque d’Europe. Partout autour d’eux, dans les rayons, sur des présentoirs vitrés, s’étalaient des œuvres en tous points extraordinaires : Le Libro d’ore Borromeo, un célèbre Virgile avec des annotations en marge de Francesco Pétrarque et enluminé par Simone Martini, l’Antiphonaire de Bangor de Giuseppe Flavio en version latine sur papyrus, et même des recueils manuscrits originaux comme le De prospectiva pingendi de Piero della Francesca.
-“Il a trouvé la cachette du Decameron”, s’écria Bonnacci. “Je suis sûr qu’il a trouvé la cachette du Valdarfer”.
Alors qu’ils pressaient le pas, le conservateur, visiblement surpris et pas mal essoufflé, expliqua péniblement qu’il s’agissait d’un incunable, un livre imprimé entre le début de l’imprimerie occidentale et la fin du premier siècle de la typographie. C’était l’imprimeur vénitien Christopher Valdarfer qui le premier avait imprimé le Decameron de Boccace, à Venise en 1471. Après un long parcours de plusieurs siècles tumultueux, l’incunable avait enfin trouvé le repos dans un vitrine protectrice de la Biblioteca Ambrosiana.
Au pied de l’incunable, comme quelqu’un sûr de son fait et qui pratique ce geste depuis fort longtemps, le vieux Bonnacci donna un petit coup sec de sa canne dans le panneau de bois, qui tomba comme une feuille. Derrière le panneau, dans la semi pénombre de la lumière artificielle sous l’incunable, l’enfant était bien là, assis au milieu d’un tas de livres éparpillés, en train de feuilleter pêle-mêle les pages de copies d’ouvrages de Saint Thomas d’Aquin, d’Aristote, de Machiavel, ou de Galilée, sans qu’on sache trop s’il s’agissait de lire, ou plutôt simplement de jouer avec les livres.
Guilio, qui n’avais pas lâché la main de son épouse depuis de longues minutes, poussa enfin un soupir de soulagement. Tous, ils se congratulèrent enfin, de vives poignées de mains furent échangées, et la pression retomba. Le conservateur voyait s’éloigner les ennuis, le personnel pourrai rentrer chez lui sans avoir à subir les interrogatoires de la police du régime, et le musée allait pouvoir fermer ses portes comme si rien de particulier ne s’était produit.
Le vieux Bonnacci, qui observait l’enfant d’un air aussi amusé que songeur, se tourna vers les parents, et lança, avec son incroyable accent :
-“Con arte e con inganno, si vive mezzo l’anno; con inganno e con arte, si vive l’altra parte.”
Ce qui pourrait se traduire par :
– « Avec esprit et habileté, on atteint le milieu de l’année; avec habileté et esprit, on peut vivre l’autre moitié”
Puis il tourna prestement les talons. L’on entendit encore quelques minutes s’éloigner l’écho décidé de la canne sur le marbra de Carrare, et puis ce fut tout.
Le jeune homme fut sorti doucement de sa paisible cachette, et il ne vint à l’esprit à personne de le gronder. Ses deux parents le prirent chacun par une main, et ils se dirigèrent tous trois vers la sortie.
Tandis qu’ils marchaient d’un pas intimidé à travers le dédale du vaste et solennel musée désormais vide, son père lui murmura simplement :
– « Il est temps de partir maintenant, Umberto. Nous avons encore un long chemin à parcourir. »
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Abou Bakr al-Baghdadi
État islamique en Irak et au Levant
Quelque part entre la Syrie, l’Irak, et chez vous.
Monsieur Le Président de la République française,
Tout d’abord, cher Président français, si vous croisez votre prédécesseur au détour d’un dîner en ville, ou aux abords du bureau d’un juge d’instruction, veuillez lui transmettre mes sincères salutations. Un amateur de montres de luxe qui entretient des amitiés sincères et désintéressées avec le Qatar est forcément un type fréquentable, je suis bien placé pour l’affirmer.
J’espère que vous avez beau temps en ce mois d’avril 2015. Ici, il fait une chaleur à vous décourager de décapiter un otage, et même faire du stock-car avec les bulldozers dans les ruines de Nimrud n’amuse plus mes petits camarades. Les climato-sceptiques devraient venir plus souvent trucider, violer et massacrer avec nous sur Mossoul, ils verraient que l’épuration ethnique par 50°, ça n’a rien d’une sinécure.
Mon cher Président, j’ai donc trouvé un coin d’ombre et de table dans la salle de rédaction de notre magazine Dar Al-islam, et je vous écris cette lettre aux doux sons des ventilateurs et des impacts de balles des exécutions sommaires de femmes enceintes dans la cour de l’école, là dehors.
Alors voilà, moi et mes petits camarades, nous tenons à vous remercier de tout cœur.
Nous sommes pleinement conscient de tout ce que vous avez fait pour nous. Des années de déni des problèmes d’oppressions économiques et sociales de vos classes populaires, c’était déjà une aubaine. Vous avez réussi tout de même à parquer la grande majorité de vos pauvres dans des ghettos d’où il leur est sociologiquement impossible de s’échapper, et rien que pour ça, bravo ! D’immenses centres de recrutement à ciel ouvert, équipés juste de la télévision, que demander de plus, c’était inespéré !
Plus d’un millier de vos compatriotes nous ont rejoints, et outre le fait qu’un trop grand nombre de roux donne à nos brigades de faux airs de boys-band de hipsters en plein safari-croisière salafiste, ils étaient tellement perdus à tourner en rond au chômage chez vous qu’ils se révèlent ici être des dépeceurs, des écorcheurs et des violeurs de premier choix, et de fidèles soumis à nos ordres. Il nous ont d’ailleurs raconté qu’en France, les massacres plus ou moins religieux, c’était une tradition de longue date. Ça nous a tous fait un tout petit pincement à l’absence de cœur, je vous l’avoue.
Vos classes politiques et journalistiques ont également pris grand soin de stigmatiser pêle-mêle les arabes et les musulmans dans un art de l’amalgame que même nous n’oserions pas pratiquer en pleine orgie de décapitations collectives. C’est dire.
Dresser les composantes des populations les unes contre les autres, je vois que vous et vos collègues aussi savez pousser lentement mais sûrement à l’oppression des cultures minoritaires. Alors, certes, vous vous entraînez sur les Roms depuis dix siècles, mais tout de même, turban bas !
Concernant votre fameux 11 janvier, notez tout de même que chez nous, il est plutôt anecdotique. Ici des enfants de 6 ans dégomment 40 chiites turkmènes au petit déjeuner, on en fait pas tout un Biryani. Par contre, nous avions bien ri avec les déclarations de vos collègues qui demandaient aux musulmans de se désolidariser de nos frères criminels fléaux meurtriers auto-décapsulés. Vous devriez demander à tous vos compatriotes blancs de se désolidariser de mes confrères meurtriers de masse Breivik ou Lubitz, ou mieux, de tous les crétins blancs qui sont venus nous rejoindre récemment. D’ailleurs, nous avons dû en exécuter quelques uns, ils nous parasitaient les parties de GTA5 en se plaignant qu’il y ait du sable dans la PlayStation 4.
Mais alors là, Monsieur le Président, alors là ! Nous avons appris par vos organes de propagande médiatiques que vous et vos collègues comptiez mettre en place une surveillance de masse de votre population, au prétexte de lutter contre nous autres, les terroristes (nous préférons criminels barbares, mais soit). Quelle merveilleuse idée !
Vos concitoyens étaient déjà oppressés socialement par les inégalités croissantes, économiquement par la – dépend pour qui – crise de 2008 (heureusement, je crois savoir que votre CAC40 va bien), par l’aggravation générale de leur santé (notez qu’une balle coûte moins cher que la CMU, vous devriez y songer), ou de leur niveau d’éducation, oppressés médiatiquement en permanence par un torrent de faits divers morbides – dont les nôtres -, et la montée chronique et croissante de vos fascistes amateurs.
Mais alors là ! La surveillance globale des ordinateurs, des conversations téléphoniques, des SMS, des connexions internet, des forums, sites de rencontres ou de discussions, des réseaux sociaux, des Box, des tuyaux des opérateurs ou des réseaux de fibre, sous prétexte d’empêcher de terrorismer en rond, c’est carrément Byzance le samedi soir !
Du coup, avec nos 2 MIG, nos Humvees, nos chars, nos blindés légers et notre montagne d’armes individuelles pour contrôler nos milliers d’esclaves, nous allons finir par avoir l’air totalement vintage, voire carrément has-been. Tout de même, au cas où vous nous penseriez assez cons pour communiquer par Facebook, sachez que notre réseau sotsale Adopte une Mecque, fonctionne avec des pigeons qui transmettent les messages privés entre djihadistes. C’est un peu plus long, mais à moins que votre DGSI ne s’entraîne au ball-trap, nous sommes peinards pour un moment.
Un grand merci, donc, M. le Président. De plus en plus pauvres, oppressés, asservis ou ignorés, maltraités, parfois traités comme des sous-hommes, excédés par le mensonge et la tricherie chez eux, nombreux seront probablement vos concitoyens à nous rejoindre dans les temps à venir. Leur paupérisation, leur perte de confiance dans l’économie, dans la politique, dans ce que vous nommez la République, dans le Contrat social, dans l’égalité des chances, dans les notions de justice, de séparation des pouvoirs, c’est pour nous mieux que du pain béni : de la chair fraîche, et gratuite. Ils ne savent plus en quoi croire ? Nous tacherons de les aider.
Distiller la paranoïa, la peur de penser par soi-même, de réfléchir à haute voix, de débattre, d’écrire, la peur de parler parce que l’on se sait écouté, l’absence de juges pour juger, c’est carrément plus efficace que la Charia. Malheureusement, nous n’avons pas (encore) vos moyens. Vous et vos collègues êtes prodigieux, M. le Président. Notre meilleur atout. Non je n’exagère pas. Je vous le jure sur mon intégrale de Charia Hebdo. Et comme ça, si un de ces quatre nous vous rendons visite, le jour où vous nous déclarerez fréquentables, nous nous sentirons déjà un petit peu contrôlés et oppressés comme à la maison.
C’est donc au nom de tous mes collègues barbares soumis de l’Etat Islamique et de la confrérie de l’abus de tautologies – il n’y a de Dieu que Dieu – Monsieur Le Président, que je prends l’engagement que nous prierons Saint Oussama pour que vous laissiez au firmament de l’histoire une flamme digne de l’explosion d’une voiture piégée dans une zone commerciale de la banlieue nord de Bagdad.
J’ose espérer que vous prendrez la mesure de la valeur de cette lettre, même si je suis sûr qu’entre professionnels de la liquidation du concept fondamental de l’occident qu’est la Liberté, au fond, nous nous comprenons un peu.
Saluez également bien bas nos autres amis communs, ces joyeux déconneurs de wahhabites de saoudiens.
Amitiés sincères,
Abou Bakr al-Baghdadi
Dit Ibrahim Awad Ibrahim Ali al-Badri,
Dit Abou Bakr al-Baghdadi al-Husseini al-Qurashi,
Dit Dr. Ibrahim Awad Ibrahim Ali al-Samarrai,
Di Abou Du’a,
Dit Calife Ibrahim,
Dit l’écorcheur en chef de Mossoul,
Dit le dépeceur de Bagdad.
A genoux. Inclinés. Serviles, veules, médiocres, les yeux brillants d’envie, suintant la déférence.
Ils sont entre eux et nous. Nous, les cons, les gens, les veaux, les téléspectateurs, les auditeurs, les pauvres, les moins pauvres, les gueux, les perdus, les crevés, les morts de peine ou de fatigue, les déprimés, les suicidés, les harassés de l’existence.
Nous la masse.
Nous la populace.
Eux, les puissants, les riches, très riches, les ultra-riches, les élites, les actionnaires, les financiers, les patrons de edge-fund, de multinationale, de lobby, les pétrochimistes de l’alimentaire, de la santé, de la guerre, ceux qui ont le pouvoir, le vrai pouvoir d’un monde factice, le pouvoir de l’argent, le pouvoir d’anticiper, de penser avant nous, de construire avant nous, de détruire avant nous.
Ils sont entre eux et nous. Ils sont politiques, journalistes, pseudo-intellectuels, éditocrates, élus, haut-fonctionnaires, pseudo-élites. Ils sont partout, dans nos téléviseurs, dans nos radios, dans nos urnes, dans nos conversations, sur les murs de nos villes, en grand format sur ceux des kiosques, ou sur les pages d’accueil de nos navigateurs internet.
Gramsci les appelait les corps intermédiaires. Il pensait du fond de sa prison que si l’on voulait changer la société, c’était ceux-là qu’il fallait faire basculer de notre coté. Que ça irait plus vite que la révolution du peuple par le peuple pour le peuple. Que bouger les corps intermédiaires, c’était faire vaciller le pouvoir.
Mais Gramsci, c’était avant.
Avant que la masse monétaire mondiale ne double en une décennie. Que la monnaie n’ait plus corps sinon ceux de machines. Avant que la religion de l’argent, le culte de la dette, la soumission à l’économie, ne viennent définitivement renverser ce qui restait d’humaniste et de social dans les rapports entre nous, et eux. Avant que notre Contrat social ploie définitivement sous l’idéologie néo- et/ou ordo-libérale, sans qu’un retour en arrière soit envisageable autrement qu’au feu de la catastrophe.
A genoux. Inclinés. Serviles, veules, médiocres, les yeux brillants d’envie, suintant la déférence.
Ils prient leurs maîtres. Contre une maison, un voyage en avion, des vacances au soleil, un poste pour leur neveu. Ils s’inclinent devant le mensonge, ou mieux encore, le répètent, le propagent, s’il sert leurs intérêts. Ils se montrent immodérément serviles, prêts à tout encaisser pour encaisser réellement. Leurs yeux brillent d’un avenir égoïste mais ô combien opulent. Ils vendent ça comme la réussite. Le progrès. La croissance. Ils trichent, ils occultent, ils mentent. A longueur de temps. Avec un large sourire.
Je les regarde s’agiter, songeant qu’il ne s’agit là que d’une évolution auto-prédatrice de l’espèce, devenue folle sur son coin de planète, courant mécaniquement au suicide environnemental, sociologique, ethnologique, philosophique, et par dessus tout, éthique, de sa propre humanité.
Et puis je me dis qu’heureusement, tout ça, ce n’est qu’un vilain poisson d’avril.
]]>Art. 1er. Les hommes naissent e̶t̶ ̶d̶e̶m̶e̶u̶r̶e̶n̶t̶ libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l̶’̶u̶t̶i̶l̶i̶t̶é̶ ̶c̶o̶m̶m̶u̶n̶e̶ l’intérêt économique et financier.
Art. 2. Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles d̶e̶ ̶l̶’̶H̶o̶m̶m̶e̶ du pouvoir. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression.
Art. 3. Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans l̶a̶ ̶N̶a̶t̶i̶o̶n̶ l’argent. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément.
Art. 4. La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à̶ ̶a̶u̶t̶r̶u̶i̶ au bénéfice d’autrui : ainsi, l’exercice des droits naturels de chaque homme n’a de bornes que celles qui assurent aux autres Membres de la Société la jouissance de ces mêmes d̶r̶o̶i̶t̶s̶ profits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par l̶a̶ ̶L̶o̶i̶.̶ l’économie.
Art. 5. La Loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à̶ ̶l̶a̶ ̶S̶o̶c̶i̶é̶t̶é̶ au profit. Tout ce qui n’est pas défendu par la Loi ne peut être empêché sauf si vous êtes un « terroriste », et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas sauf si vous êtes un « terroriste ».
Art. 6. La Loi est l’expression de la volonté g̶é̶n̶é̶r̶a̶l̶e̶ de quelque uns. T̶o̶u̶s̶ ̶l̶e̶s̶ C̶i̶t̶o̶y̶e̶n̶s̶ ̶o̶n̶t̶ Seuls quelques lobbyistes ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être l̶a̶ ̶m̶ê̶m̶e̶ ̶p̶o̶u̶r̶ ̶t̶o̶u̶s̶ orientée, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Tous les Citoyens étant é̶g̶a̶u̶x̶ l’élite à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur c̶a̶p̶a̶c̶i̶t̶é̶ influence, et sans autre distinction que celle de l̶e̶u̶r̶s̶ ̶v̶e̶r̶t̶u̶s̶ leur richesse et de leur t̶a̶l̶e̶n̶t̶s̶ pouvoir.
Art. 7. Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, sauf si vous êtes un « terroriste », et selon les formes qu’elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être p̶u̶n̶i̶s̶ invités à la télévision et mis au pouvoir ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à l’instant : il se rend coupable par la résistance.
Art. 8. La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment n̶é̶c̶e̶s̶s̶a̶i̶r̶e̶s̶ préférentielles, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée sauf si vous êtes un « terroriste ».
Art. 9. Tout homme riche étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré c̶o̶u̶p̶a̶b̶l̶e̶ innocent, s’il est jugé indispensable de l̶’̶a̶r̶r̶ê̶t̶e̶r̶ l’inviter sur un plateau, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi.
Art. 10. Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi, à l’exception des musulmans.
Art. 11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi, et s’il est un “terroriste”.
Art. 12. La garantie des droits de l’Homme et du Citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l’avantage de t̶o̶u̶s̶ quelques uns, et ̶d̶o̶n̶c̶ pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.
Art. 13. Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les ̶c̶i̶t̶o̶y̶e̶n̶s̶ pauvres, en raison de leurs f̶a̶c̶u̶l̶t̶é̶s̶ grand nombre.
Art. 14. ̶T̶o̶u̶s̶ ̶l̶e̶s̶ Seuls quelques Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée.
Art. 15. ̶L̶a̶ ̶S̶o̶c̶i̶é̶t̶é̶ Les dirigeants a̶ ont le droit de demander compte à tout Agent public de son administration.
Art. 16. Toute Société dans laquelle la garantie des ̶D̶r̶o̶i̶t̶s̶ Bénéfices n’est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution.
Art. 17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité ̶p̶u̶b̶l̶i̶q̶u̶e̶,̶ économique et financière légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une j̶u̶s̶t̶e̶ injuste et p̶r̶é̶a̶l̶a̶b̶l̶e̶ arbitraire indemnité.
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Swissleaks : Données bancaires mondiales portant sur la période 2005-2007 dévoilant les dessous d’un vaste système d’évasion fiscale mis en place par l’établissement britannique HSBC, deuxième groupe bancaire mondial, par l’intermédiaire de sa filiale suisse HSBC Private Bank.
Les clients de la banque ne sont pas forcément dans l’illégalité. (hum)
Sont notamment cités dans les Swissleaks les noms suivants :
A. Dan Azoumi – Trader de diamants.
A. K. Gulamali – Intermédiaire en ventes d’armes.
Alain Afflelou – Entrepreneur.
Alejandro Andrade – Politicien.
Alfred Taubman – Milliardaire US.
Aliko Dangote – 1ère fortune d’Afrique.
Álvaro Noboa – Politicien équatorien.
André Guelfi (dit « Dédé la sardine ») – Homme d’affaires (sic).
André Tarallo – Ancien patron d’Elf au Gabon.
Arlette Ricci – Héritière de la célèbre marque de parfum.
Aymeri de Montesquiou – Sénateur (UDI) du Gers.
Belhassen Trabelsi – Beau-frère de Ben Ali.
Bruno Wang – Fils du Taïwanais Andrew Wang, ancien intermédiaire dans la vente de frégates par la France à Taïwan en 1991.
Carlos Hank Rhon – Milliardaire mexicain.
Cédric Klapisch – Metteur en scène.
Christian Karembeu – Footballeur.
Christian Slater – Acteur.
Christophe Dugarry – Footballeur.
David Bowie – Artiste.
Diane v. Fürstenberg – Créatrice de mode.
Diego Forlán – Joueur de football.
Donald Sussman – Financier US.
Edmond J. Safra – Banquier.
Édouard Stern – Banquier.
Élias el-Murr – Ancien ministre libanais.
Elle MacPherson – Modèle.
Emilio Botín – Ancien patron de la banque espagnole Santander.
Emmanuel Shallop – Homme d’affaires libano-belge (condamné pour trafic de diamants en Afrique).
Famille Mentzelopoulos – Propriétaires de Château Margaux.
Famille Ouaki – Propriétaires de Tati jusqu’en 2004.
Famille Steinmetz – Diamantaires israéliens.
Fana Hlongwane – Intermédiaire en ventes d’armes.
Fernando Alonso – Pilote de Formule 1.
Flavio Briatore – Homme d’affaires et directeur d’écuries de F1.
Frank Giustra – Entrepreneur canadien.
Fumihiko Maki – Architecte contemporain japonais.
Gad Elmaleh – Comédien.
Gennady Timchenko – Milliardaire proche de Poutine.
Georges Frem – Ancien ministre et député libanais.
Gilberte Beaux – Femme d’affaires ex-associée de Bernard Tapie.
Horacio M. Cartes – Président du Paraguay depuis 2013.
H.H. Karekin II – Patriarche suprême de la sainte Église orthodoxe apostolique arménienne.
Heikki Kovalainen – Pilote de Formule 1.
Helmut Newton – Photographe.
Ian McKay – Juge à la Cour d’Appel de Nouvelle-Zélande.
Jacques Dessange – Entrepreneur.
Jaime Camil Garza – Développeur mexicain milliardaire
Jean-Charles Marchiani – Condamné dans l’Angolagate, ami de Charles Pasqua.
Jean-Yves Ollivier – Homme d’affaires, ex-conseiller de Jacques Chirac.
Jeanne Moreau – Actrice.
Joan Collins – Actrice.
John Magnier – Magnat irlandais de l’élevage de chevaux de course.
Johnson Muthama – Politicien et homme d’affaires kényan.
Jonathan Kollek – Trader dans le pétrole.
José Mestre Fernandez – Condamné à douze ans de réclusion pour avoir introduit près de 200 tonnes de cocaïne en Espagne.
Joseph Fok – Juge permanent à la Cour d’Appel de Hong Kong.
Kartini Muljadi – Juge, avocate, et plus riche femme d’Indonésie.
Kerry Packer – Magnat des médias australiens.
King Abdullah II – Roi de Jordanie.
King Mohammed VI – Roi du Maroc.
Les Wexner – CEO de l’entreprise Limited Brands.
L. Lavrentiadis – Homme d’affaire grec.
Li Xiaolin – Fille de l’ancien Premier ministre chinois Li Peng et Présidente de China Power International.
Lisa Azuelos – Réalisatrice du film LOL. (lol)
Marat Safin – Joueur de tennis.
Meyer Habib – Député UDI de la 8ème circonscription des Français de l’étranger.
Michel Piccoli – Acteur.
Michel Tubiana – Avocat.
Mohammad Safadi – Député libanais et ancien ministre des Finances.
Moncef Mzabi – Homme d’affaires tunisien en charge de la représentation officielle du groupe Renault-Nissan en Tunisie.
Mortimer D. Sackler – Industriel US dans le pharmaceutique.
Mukesh et Anil Ambani – Frères barons de l’industrie indienne et proches du Premier ministre Narendra Modi.
N. de Leon Escaler – Diplomate.
P. Srichaphan – Joueur de tennis.
Patrick Bédié – Homme d’affaire ivoirien.
Paul Bocuse – Cuisinier.
Peter Lindbergh – Photographe de mode.
Phil Collins – Musicien.
Philippe Lavil – Musicien.
Prince Bandar – Diplomate saoudien.
R. M. Rachid – Ancien ministre égyptien du Commerce et de l’industrie.
Rajan Raheja – Milliardaire indien.
Ralph Sonnenberg – Milliardaire allemand.
Rami Makhlouf – Entrepreneur (cousin du président syrien Bachar al-Assad).
Richard Prasquier – Ex-président du CRIF.
Roger Boka – Magnat du Tabac.
Saber Daboussi – Trader tunisien basé en Suisse.
Salman bin Hamad Al-Khalifa – Prince héritier du Bahreïn.
Saïd Ali Coubèche – Politicien Djibouti.
Salaheddine Bashir Gherfal – Homme d’affaires libyen.
Samir Abdelli – Avocat d’affaires tunisien, ex-candidat à l’élection présidentielle 2014.
Selim Alguadis – Homme d’affaire turc qui a collaboré avec la Libye sur un projet nucléaire secret.
Slim Bourricha – Fabricant de yachts franco-tunisien.
Stella de Rosnay – Épouse du scientifique et écrivain Joël de Rosnay.
Sultan Qaboos – Sultan d’Oman.
Sultanah Kalsom – Sultane de Pahang.
Tarek Bouchamaoui – Homme d’affaire tunisien, ancien président de la commission d’arbitrage de la Confédération Africaine de Football.
Temimi Kablouti – Secteur audiovisuel tunisien.
The Flick Family – Industriels allemands.
The Steinbruch family – Industriels brésiliens du textile.
Timur Kuanyshev – Magnat du pétrole.
Tina Turner – Artiste.
Valentino Garavani – Créateur de mode.
Valentino Rossi – Pilote de moto.
Liste constituée à partir d’articles d’organes de presse français et étrangers.
]]>C’est un peu long à expliquer, comme toutes les angoisses existentielles profondes, désolé par avance, je sais qu’aujourd’hui il est préférable que tout aille vite. Mais quand même.
Pour ce qui est d’aller vite, donc, en France, la plus grande partie des presque 8000km de réseau autoroutier appartiennent à Eiffage ou Vinci, les tronçons restants allant à quelques autres sociétés (Adelac, Albea, Alicorne, Alis, Atlandes, ATMB, SFTRF, SMTPC…) qui se partagent les miettes du gâteau en bitume.
Depuis 2002, l’État s’est désengagé progressivement des sociétés public/privé de gestion des autoroutes alors que celles-ci devenaient justement rentables. Faire faire du bénéfice à l’État avec des biens financés par l’État, quelle idée saugrenue, vous en conviendrez ! Il était bien normal que des infrastructures routières financées par les citoyens, les impôts directs ou indirects, l’argent public donc, rapportent finalement à des sociétés privées. Sur ce point, depuis 2002, PS et UMP sont sur la même longueur d’onde, et tous ceux qui n’ont point les mains sur le volant se les frottent gaiement.
Ces privatisations auront notamment permis d’augmenter les tarifs des péages en moyenne de 1,97% par an entre 2006 et 2013. Les citoyens ont payé pour la construction de ces autoroutes, quoi de plus logique que de les faire payer encore plus cher pour avoir le droit de les emprunter !
L’autorité de la concurrence française s’est penchée sur le sujet, et a constaté en 2014 avec un large sourire, que l’ensemble des sociétés autoroutières sont « très rentables », entre 20% et 24%, suivant les sociétés, une fois qu’on a déduit les investissements, les frais financiers et les impôts. Les actionnaires peuvent souffler. Car vous ne vous en rendez certainement pas compte, mais le prix du plein d’un Falcon 8X de chez Dassault, ce n’est pas exactement le prix du plein de votre Dacia.
Ces sept principales sociétés ont ainsi engrangé un bénéfice net cumulé de 1,8 milliards d’euros en 2013. Jusque là, vous me direz, pas de quoi s’alarmer pour elles. C’est une affaire qui roule, vous en conviendrez, même si on peut toujours accélérer !
Mais voilà, il a fallu que Ségolène Royal, la bolchévique du Poitou, mette son grain de sel dans l’histoire, et commence à parler récemment de “gel des tarifs en 2015”. Bon certes, pas de quoi déclencher une grève du CAC40, mais tout de même ! Les sept concessionnaires historiques ont distribué 14,6 milliards d’euros de dividendes depuis 2006 à leurs actionnaires, il ne faudrait surtout pas les freiner sur cette lancée. Tu pars en vrille, Ségolène !
D’autant qu’à l’aube du XXIe siècle, quand Pôle Emploi te dit qu’il faut être “mobile”, “flexible”, prêt à “faire des bornes” pour travailler, et que les actionnaires se frottent opportunément les mains, ce n’est pas vraiment le moment de jeter du sable dans les rouages de la machine à cash.
C’est là qu’à commencé mon angoisse existentielle. Je me suis dit : “mais merde, les pauvres, comment ils vont faire pour engranger des milliards de bénéfices si on gèle les tarifs ?”. Je n’en dormais plus la nuit.
La journée, je passais à un maximum de péage, jetant par la fenêtre des billets de 50€, en signe de solidarité. Je tombais parfois volontairement en panne, histoire de leur signer un chèque de 184,26 € TTC pour être dépanné.
La situation était désespérée. Il fallait intervenir.
Je commençais alors à me pencher sur la rédaction d’un projet de taxe carbone sur les véhicules des particuliers, taxe qui pourrait être directement collectée et encaissée par les sociétés autoroutières, pour compenser les émissions de carbone de leurs Falcon.
Envoyer le tout au ministère de la stalinienne du marais poitevin, ou au sémillant Rothschildien décomplexé Emmanuel Macron ? Le dilemme était cruel. Je restais prostré.
Et puis voilà, le soulagement est ENFIN arrivé ce matin, en ouvrant le JDD. Je ne vous dis pas comment je me suis senti enfin déchargé d’un fardeau immense.
Vraiment, merci François.
]]>Mais il se pourrait que je me convertisse demain au taboulage, que je prie ainsi le Taboulé, et que je laisse derrière moi définitivement le carotte-rapage. J’exigerai alors, au nom de ma foi, et du respect absolu du Taboulé, qu’on mette immédiatement en œuvre une limitation de la liberté d’expression afin que mon Dieu Taboulé ne soit pas caricaturé, ne soit pas offensé, qu’on ne lui manque jamais de « respect ».
Ce qui est important, ce n’est pas qu’on restreigne vos libertés, fut-elle la première des libertés, celle de s’exprimer. Ce qui est important, ce n’est pas qu’on vous empêche de parler, de dessiner, d’écrire, et d’exprimer vos pensées. Ce qui est important, c’est que vous montriez un respect absolu pour l’objet du délire de communautés d’humains que l’abus manifeste de science-fiction fait régulièrement disjoncter.
« 50% des personnes interrogées se déclarent favorables à « une limitation de la liberté d’expression sur internet et les réseaux sociaux » »
(Sondage IFOP/JDD du 18 janvier 2015)
Bande de cons.
Dessin de Cabu paru en couverture de Charlie Hebdo le 8 février 2006.
La situation était critique. A l’intérieur de la C6, le ministre jonglait nerveusement avec ses téléphones, enchaînant les appels, tandis que Marie-Caroline, sa secrétaire particulière, composait à mesure les numéros des intéressés. Le ministre était en retard, il avait une place réservée en première classe sur un avion de ligne à 11H, mais l’affaire se présentait mal. Le ministre était sorti d’une réunion à Matignon avec quarante cinq bonnes minutes de retard, et la circulation était particulièrement dense dans le froid du matin.
– C’est le Maire, dit Marie-Caroline au ministre, après avoir réceptionné un appel sur un des téléphones privés du ministre. Il y a un problème avec l’Intermarché.
Le ministre pris le téléphone, salua le jeune maire qui dirigeait temporairement la ville de son fief pendant qu’il exerçait quelque temps sa fonction de ministre.
– Salut Marc-Etienne. Que se passe-t-il… ? Oui, oui, ça va… oui, je suis pressé, là, explique moi… Oui, toujours ok pour la partie de chasse de dimanche… Il faudra prévoir des 4×4 pour mes équipes de sécurité… ok c’est prévu, d’accord… Et pense surtout à un dispositif pour bloquer les journalistes… j’ai pas envie de me retrouver dans Paris-Match lundi pour une chasse à courre…. Oui Marc-Etienne, bon, alors… explique…
Le ministre écouta avec attention, le visage concentré, tandis que le moteur de la C6 vrombissait puissamment.
– Ok, j’appelle Jacques, conclut le ministre. Marie-Caroline, appelez-moi le Préfet, il y a un problème avec le terrain du futur Intermarché, des paysans bloquent l’accès avec des tracteurs, des pancartes, des ballots de paille, et je ne sais pas trop quoi encore…
Marie-Caroline composa le numéro du Préfet, qui décrocha immédiatement.
– Allo, Jacques, oui salut… Oui, oui, on se voit toujours dimanche…. Bon, écoute, on a un problème. Des gars bloquent le chantier de l’Intermarché qui doit démarrer lundi matin. Il faut qu’on déverrouille la situation, sinon le directeur régional d’Inter va encore nous pourrir la sortie de dimanche parce que ses travaux ont du plomb dans l’aile. Oui… Oui c’est ça… Oh ils sont une trentaine, pas de quoi s’inquiéter. Écoute… fait intervenir 4 ou 5 fourgons de CRS, mais vous me faites ça dans le calme, hein. Je ne veux pas d’esclandre… Bah ils gueulent parce que soit-disant ça va tuer les commerces du centre-ville… Qu’est-ce que j’y peux, moi… On a pas de loi pour les empêcher d’acheter des terrains et de s’installer… Ils sont marrants les cons… Ouais, bon, ok je compte sur toi. Et discret, hein. Et tu me neutralise les journalistes, faut pas que ça fuite… ok… Merci Jacques… on se voit dimanche… Oui, toi aussi… embrasse Anne-Marie… ouais… salut.
Derrière le convoi du ministre, un concert de klaxons de véhicules enchevêtrés dans un étrange ballet, sorte de colonie de fourmis bourrées, couvrait presque les sirènes.
– L’A1 est complètement bouchée, monsieur le Ministre, murmura fébrile Marie-Caroline, en consultant sa tablette tactile.
– Il faut me dégager un passage, appelez la sécurité de l’autoroute, qu’ils me libèrent une voie en urgence.
Marie-Caroline s’exécuta, et on pouvait deviner que quelques minutes après l’appel, les forces de la sécurité routière était déjà à l’oeuvre. Le ministre regardait sans cesse sa montre, fébrile. Un de ses trois téléphones sonna. C’était le cabinet du ministère. “Oui… non.. je ne sais pas, on est vraiment à la bourre et ça roule très mal, je ne sais pas si on va l’avoir…. Écoute, Jean-Charles, par sécurité, je préférerais que tu me bloques un Falcon, si on arrive trop tard… Oui, tu appelles Henri, tu dis que c’est pour moi, qu’ils facturent ça au ministère. Ils en ont toujours d’avance dans les hangars à Roissy. Je ne peux pas me permettre de ne pas décoller, ni même d’arriver à la bourre… tu comprends… ? ok… Merci…”
– Si c’est trop bouché, on peut faire venir un hélico, M. le ministre, suggéra Marie-Caroline. On peut s’arrêter sur la route, l’hélico nous prend et nous pose à l’héliport, on peut gagner quinze bonnes minutes.
– On aurait même du partir de l’héliport de Bercy, acquiesça le ministre. On y serait déjà…
Les textos pleuvaient sur les téléphones du ministre et de Marie-Caroline, la délégation ministérielle et ses invités étaient déjà au pied de l’avion, et l’absence du ministre inquiétait tout le monde. En plus des officiels et de l’équipe ministérielle, il y avait là une bonne dizaine de grands PDG, des capitaines d’industries, et quelques journalistes triés sur le volet.
Marie-Caroline s’empressait de répondre d’un ton rassurant et décidé. “Nous arrivons… nous sommes sur la route… ça circule mal mais nous sommes bientôt là…”
Après vingt minutes, c’est la direction d’Air-France qui appela. Ils ne pouvaient plus faire attendre l’avion. Le ministre éclata d’une colère puissante, se mit à hurler au téléphone sur son interlocuteur, tout en sachant au fond que ça ne servait à rien. Il raccrocha, excédé, vaincu par les impératifs de rentabilité de l’aviation civile.
– On ne pèse plus que 15% d’Air France, voilà le résultat, maugréa le ministre. On va devoir prendre le Falcon, ça en est-où, Marie-Caroline ?
– L’avion est prêt sur une piste privée, M. le ministre. Ils nous attendent, moteur démarré.
– Bon ok… Avec ces conneries, je rate un voyage avec Leblanc et Dubois. Les deux PDG de multinationales que je voulais bichonner pour les législatives… Et merde… Marie-Caroline, organisez-moi un repas le premier soir avec eux, et vous me choisissez un endroit branché, haut de gamme, mais discret, hein, genre un salon privé, qu’on puisse causer tranquillement.
– Bien monsieur le Ministre. J’appelle notre équipe sur place, ils vont mettre ça en place discrètement.
Le téléphone privé du ministre sonna, c’était son épouse qui cherchait à le joindre pour la troisième fois ce matin.
– Pas le temps, bordel, elle m’emmerde, pesta le ministre. Marie-Caroline, vous voulez bien la rappeler, et lui dire que je ne suis pas disponible, que je la rappellerai ce soir ?
Au téléphone, Marie-Caroline pris sa voix la plus douce et la plus calme, bien qu’en face la colère de l’épouse soit plus que palpable. Le ministre entendait vaguement les cris stridents de son épouse s’échapper d’entre le téléphone et l’oreille de Marie-Caroline.
Sur L’A1, la voie d’arrêt d’urgence avait été sécurisée par les forces de sécurité. Le convoi filait maintenant à 150 km/h le long des trois files de véhicules plus ou moins arrêtées dans le bouchon. Bientôt l’aéroport se profilait à l’horizon, et le ministre poussa un soupir sifflant de soulagement.
– Avec le Falcon 7X, nous pouvons arriver bien avant l’Airbus d’Air France, affirma Marie-Caroline, tentant de rassurer au mieux le ministre.
– Il faudra rester discret là-dessus, Marie-Caroline, organisez-moi une sortie incognito de l’avion à l’arrivée, et surtout je veux des véhicules aux vitres fumées, qu’un photographe à la con ne vienne pas me shooter avec le Falcon en arrière plan. La journée est déjà assez pourrie comme ça.
Le ministre avait pris un retard conséquent après une réunion tendue avec le premier ministre à cause d’un problème sur sa déclaration de patrimoine, il ne fallait surtout pas que les événements empirent en cascade.
Le convoi s’arrêta finalement sur la piste, au pied du triréacteur. L’accès avait été prestement dégagé pour qu’il puisse arriver en trombe, sans risque.
Ils sortirent tous des véhicules, montèrent deux par deux les marches de la passerelle du Falcon, et bientôt le ministre, Marie-Caroline, les secrétaires, les assistants, et le service de sécurité, s’engouffraient dans l’avion. A l’intérieur, le ministre s’étala dans un épais fauteuil en cuir, soulagé d’être enfin à bord de l’avion, qui ne tarda pas à décoller.
– Pfiou… on est bon, s’excalama-t-il, visiblement enfin soulagé. Imaginez le scandale, Marie-Caroline. Imaginez qu’un ministre français arrive à la bourre à la Conférence Internationale sur le climat, ce serait vraiment une honte pour la république.
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Prenez un premier ministre né à Barcelone, qui a acquis la nationalité française par naturalisation, mais qui déclare sans sourciller que « l’intégration dans notre pays est un échec ».
Prenez un conflit géopolitique dans lequel ces tristes volatiles ont avec les protagonistes les plus puissants des intérêts idéologiques, politiques, économiques, culturels, familiaux, communs.
Puis, suivez la recette :
– Interdisez une manifestation de gens qui réclament la justice et la fin du conflit, ce qui provoquera immanquablement une frustration immense, un sentiment d’injustice, et une colère profonde.
– Une fois le piège tendu, attendez que se réunissent tout de même principalement les plus radicaux des deux camps, les plus modérés préférant se conformer à la loi.
– Quand la situation est enfin hors de contrôle, laissez bouillir dans les médias quelques heures.
– Une fois la stratégie du choc mise en place (vous aviez déjà testé au préalable que rien qu’une manifestation bloquée contre un aéroport ne manquait pas de dégénérer), faites diffuser un sondage selon la méthode des quotas auprès de 9̶0̶0̶ ̶p̶e̶r̶s̶o̶n̶n̶e̶s̶ la population du pays signifiant que ces manifestations sont scandaleuses, et que la majorité du pays est contre.
– Envoyez le premier ministre déclarer au parlement qu’un « nouvel antisémitisme » est intolérable.
La soupe est prête :
Vous avez transformé un conflit politique en un conflit religieux, créé l’amalgame entre les partisans d’un règlement pacifique du conflit et des minorités violentes, détourné l’attention collective des rapports militaires, sécuritaires, commerciaux, financiers, stratégiques, qui vous unissent autour d’une doctrine néolibérale commune dont les effets dévastateurs sont pourtant visibles partout, et non content de détourner l’attention collective du véritable débat historique, politique et culturel que sous-tend ce conflit, vous obtenez que le citoyen confonde les bananes plantain et les lapins de garenne.
Ah, et cerise sur le gâteau, par un vil calcul, vous avez même fait grimper dans les médias les thématiques susceptibles de cliver électoralement le pays à votre avantage en vue des prochaines élections.
Finalement, Nicole Bricq avait peut-être raison, la cuisine de l’Elysée est vraiment « dégueulasse« …
]]>Avec ma lampe de poche, j’ai traversé l’Amazonie plusieurs fois en large et en travers, à dos de mule et en pirogue pourrie, je suis allé au bordel à Caracas, j’ai rencontré des dictateurs, j’ai traversé des révolutions, j’ai croisé des fantômes, des cochons qui parlaient, des arbres qui enseignaient, j’ai écrit dans des journaux naissant, j’ai pissé sur des fleurs, sur des églises, j’ai appris à me sevrer des adverbes cons qui finissent en « ment », j’ai beaucoup beaucoup écouté la mer Caraïbes, j’ai dansé avec des âmes en feu, j’ai embrassé des peaux de toutes les couleurs du monde, j’ai passé ma main dans des cheveux plus noirs que la mort, j’ai couru plus vite que la peur avec des balles au cul, et à la fin, j’ai même rencontré ma maman.
Tu sais, j’ai vécu ma vie pour la raconter.
Vivir para contarla.
Alors, tu peux bien te barrer, Gabriel Garcia Marquez.
Il y a longtemps que j’ai planqué tous tes livres sous mon pieu.
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